jeudi 21 octobre 2010

Le Crucifié-Ressuscité. Quelle sagesse ?




1 Corinthiens 1
17 Le Christ ne m'a pas envoyé baptiser, mais annoncer l'Evangile, et sans recourir à la sagesse du discours, pour ne pas réduire à néant la croix du Christ.
18 Le langage de la croix, en effet, est folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui sont en train d'être sauvés, pour nous, il est puissance de Dieu.
19 Car il est écrit : Je détruirai la sagesse des sages et j'anéantirai l'intelligence des intelligents.
20 Où est le sage ? Où est le docteur de la loi ? Où est le raisonneur de ce siècle ? Dieu n'a-t-il pas rendue folle la sagesse du monde ?
21 En effet, puisque le monde, par le moyen de la sagesse, n'a pas connu Dieu dans la sagesse de Dieu, c'est par la folie de la prédication que Dieu a jugé bon de sauver ceux qui croient.
22 Les Juifs demandent des signes, et les Grecs recherchent la sagesse ;
23 mais nous, nous prêchons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens,
24 mais pour ceux qui sont appelés, tant Juifs que Grecs, il est Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu.
25 Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes.


1 Corinthiens 2
2 J'ai jugé bon, parmi vous, de ne rien savoir d'autre que Jésus-Christ — Jésus-Christ crucifié.
3 Moi-même, j'étais chez vous dans un état de faiblesse, de crainte et de grand tremblement ;
4 ma parole et ma proclamation n'avaient rien des discours persuasifs de la sagesse ; c'était une démonstration d'Esprit, de puissance,
5 pour que votre foi ne soit pas en la sagesse des humains, mais en la puissance de Dieu.
6 Cependant, c'est bien une sagesse que nous énonçons parmi les gens « accomplis » : une sagesse qui n'est pas de ce monde ni des princes de ce monde, qui doivent être réduits à rien ;
7 nous énonçons la sagesse de Dieu, mystérieuse et cachée, celle que Dieu a destinée d'avance, depuis toujours, à notre gloire ;
8 aucun des princes de ce monde ne l'a connue, car s'ils l'avaient connue, ils n'auraient pas crucifié le Seigneur glorieux.


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Quelques citations :

A. Schweitzer, La mystique de l’Apôtre Paul (Albin Michel 1962) :

« Tandis qu’en Jésus-Christ, la mort et la résurrection sont apparues avec évidence, chez les élus le processus est caché, mais non moins réel. Par ce qu’ils son un avec Jésus-Christ dans leur nature corporelle, ils deviennent, par sa mort et sa résurrection, des êtres en voie de mort et de résurrection, quand bien même l’aspect de leur existence naturelle subsiste. » (p. 101)

A. Badiou, Saint Paul, La fondation de l’universalisme (PUF 1997) :

« Quand le christ meurt, nous, les hommes, cessons d’être séparés de Dieu, puisqu’avec l’envoi de son Fils, se filialisant, il entre au plus intime de notre composition pensante. » (p. 73)

« La mort nomme ici une renonciation à la transcendance. Disons que la mort du Christ este le montage d’une immanentisation de l’esprit. » (p. 73)

Cf. Philippiens 2, 7-9 :
« 7 Il s'est dépouillé, prenant la condition d’esclave, devenant semblable aux hommes, et, reconnu à son aspect comme un homme,
8 il s'est abaissé, devenant obéissant jusqu'à la mort, à la mort sur une croix.
9 C'est pourquoi Dieu l'a souverainement élevé et lui a conféré le Nom qui est au-dessus de tout nom. »


La Résurrection est celle du Crucifié, au point que « Le Christ crucifié » est chez Paul désignation du Ressuscité.

« Chez Paul, il y a certes la croix, mais non le chemin de croix. Il y a le calvaire, mais non la montée au calvaire. » (Badiou, p. 71-72)

« La souffrance ne joue aucun rôle dans l’apologétique de Paul, pas même dans le cas de la mort du Christ. Le caractère faible de cette mort lui importe certes, pour autant que le trésor de l’événement […] doit résider dans un vase de terre. » (Badiou, p. 70)


* * *


Un Christ glorifié dans sa mort par sa résurrection, au point que cela ouvre même sur une future oblitération de la mort du Christ, via Jean — qui n’en est pas là, mais qui parlant de la croix, dit explicitement élévation, glorification !

Une oblitération présente dans la gnose, et scellée dans la lecture du Coran (S. IV, v. 156-158) désormais majoritaire dans l’islam (mais qui ne l’a pas toujours été).

Mais déjà le livre dans le livre des Actes (2, 36), Pierre proclame : « Dieu a fait Seigneur et Christ ce Jésus que vous avez crucifié. »

Une crucifixion qui ne s’arrête pas au dolorisme, mais au renversement de l’humiliation d’une telle mort dans la résurrection, une crucifixion qui pose la gloire de celui qui se relève de cette mort dans sa résurrection, est comme telle la marque et le sceau du renversement de la mort.

1 Corinthiens 15, 20-22 & 44-45 :
« Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui sont morts.
21 En effet, puisque la mort est venue par un homme, c'est par un homme aussi que vient la résurrection des morts :
22 comme tous meurent en Adam, en Christ tous recevront la vie ; […]
44 Semé corps naturel, on ressuscite corps spirituel. S'il y a un corps naturel, il y a aussi un corps spirituel.
45 C'est pourquoi il est écrit : Le premier homme, Adam, devint un être vivant. Le dernier Adam est devenu un esprit vivifiant. »



Advient ainsi, par la mort du Christ, la mort ante-mortem, la mort avant la mort de celui qui vit en Christ, participant dès lors, en ce temps, de sa résurrection.

« Mort et vie sont […] des dimensions enchevêtrées du sujet global ou corps et âmes sont indiscernables (c’est bien du reste pourquoi la résurrection, pour Paul, est forcément la résurrection des corps, c’est-à-dire résurrection du sujet divisé en son entier). (Badiou, p. 72)


Être mort à cette vie pour vivre dès aujourd’hui d’une vie nouvelle qui n’a plus à craindre même du temps qui concourt à la croissance de la vie nouvelle, et de la mort, déjà advenue dans l’union au Christ.

Telle est la sagesse que la sagesse n’a pas connue, telle est la puissance de la manifestation de la vie dans la faiblesse de celui qui meurt, vaincu de la défaite de l'humain en sa faiblesse et de ce qui la gère, la loi, qui ne fait pas entrer dans l’au-delà de la mort.

La résurrection du Crucifié est accès dès aujourd’hui à la vie via la mort déjà advenue… propre à fonder sur une parole folle, la prédication de la croix, une nouvelle sagesse : le vie dans la liberté, fondée sur la libération à l’égard de la mort même, déjà advenue pour un déferlement de la vie nouvelle par-delà la mort-même, ici et maintenant.



Paul (2) - Le Crucifié-Ressuscité. Quelle sagesse ?
R.P., KT Adultes
Antibes 21.10.2010



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